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Chapitre 44

Main page / «MAYA». Livre 1: Force mineure / Chapitre 44

Le contenu

    Je n’avais qu’à me rapprocher du «portillon», pour qu’il s’ouvre tout de suite, – y aurait-il quelqu’un qui restait là  à regarder continuellement la caméra?  Kaorou était toute seule dans son cottage.

    – Kaorou, tu regardes la caméra 24 h sur 24?

    – Sois pas stupide, Maya, on vit au 21ième siècle. Des détecteurs infrarouges sont placés le long du sentier, en outre, les caméras réagissent aux mouvements de gros objets. L’ordinateur comparent les images, et si une image correspond à ce qu’il y a dans la base de données, le portillon s’ouvre automatiquement. Sinon – un signal va au tableau de commande et les mesures adéquates sont entreprises selon les événements qui se passent. C’est très simple, pas de miracles.

    – Et si quelqu’un se met un masque avec ma photo dessus?

    – On n’est pas en Pentagone ici! Pour tous les habitants de Dharamsala ce n’est qu’une école privée de yoga, il y en a quelques dizaines ici, qui aurait donc l’idée de faire des bêtises pareilles avec des masques juste pour voir des cours de yoga ou de massage?? En plus, il ne faut pas sous-estimer les capacités de l’ordinateur. Ce n’est pas tout simplement les visages qui sont comparés, mais les manières aussi – la démarche de la personne, ses dimensions, donc pas de souci. Même si en supposant que quelqu’un pénètre ici – que verrait-il?  Des gens assis, en train de noter quelque chose dans leurs calepins. On en meurt d’ennui… Viens, je t’amène voir Michelle.

    Le cottage à Michelle était coloré en kaki et, dans l’ensemble, avait l’air assez guerrier.

    – Les «commandos» habitent ici?

    – Oui, – Kaorou m’a regardée et pouffé de rire. – Cette couleur est une blague, comme l’est le mot «commandos». Mais ce qu’ils font n’est pas du tout une blague.

    Elle a ouvert la porte, m’a poussée à l’intérieur et a disparu.

    Je m’attendais à voir tout et n’importe quoi, pourtant je n’étais pas prête à voir ce que j’ai vu en effet. Surprise, je me suis assise là où j’étais sur place.

     

    Dix ans plus tard

     

    – Vassiliy, apporte-moi la robe de chambre!

    – J’arrive, Maya… tu ne vois pas, je suis occupé?  Pourquoi à chaque fois que je me mets à la lecture du journal, tu as tout de suite besoin de quelque chose… ça me gonfle… bon d’accord, j’arrive… j’arrive!

    – Où est passé Grishka?  Est-ce qu’il est encore allé au bord de la rivière avec ses … je n’aime pas ses fréquentations… tu entends ce que je dis, Vassiliy?  Je te cause!

    – Ce soir à sept heures c’est «Spartak» qui joue!  J’ai failli oublier, bon sang… – le froissement du journal est parvenu à son comble. – Sur la 4, il y aura…

    – Quoi?? Et non, j’en ai assez de tes «Spartaks», – Maya est sortie de la salle de bains, la serviette de bain enroulée autour de la tête. – je vais regarder le show avec Pozner, donc tu fais comme tu veux… va chez Ivan pour regarder ton foot…

    En rejetant le journal, Vassiliy a levé les bras au ciel et a braqué les yeux sur sa femme avec haine.

    – Mais tu sais très bien que sa Zoîka ne me supporte pas, où je vais aller?

    – Je ne sais pas, Vassiliy, comme tu veux… – en faisant des minauderies impossibles devant le miroir, Maya examinait son bouton, apparu la semaine dernière. N’oublie pas que demain on va chez les Birukoff, leur petite-fille est née quand même… dis à Grishka qu’il vienne à temps… il faut acheter un cadeau… peut-être ce vase en cristal ira bien, tu t’en souviens, celui qu’on a vu ensemble… pourquoi c’est toujours moi qui dois y penser?  Comme si je n’avais pas d’autres choses à faire!  Tu ne t’en occupes jamais…

    – Ca y est, c’est partiiiiiiiiii…

     

    Un délire bizarre… quoi d’autre peut passer par la tête en voyant CA?  L’image qui s’est ouverte à mes yeux était tellement navrante qu’il me manquait des mots pour la décrire, et la fantaisie débile apparu de je ne sais pas où sur la future Maya désuet, en bigoudis, s’engueulant avec son mari était en réalité tout à fait à propos.

    Michelle était installée sur des coussins, croquait une pomme en fixant la télé, l’air complètement idiot. Plus près de moi, le japonais, avec lequel elle s’était amusée sur le sentier, grignotait des chips, absorbé par la télé aussi. Le cricket!  Ils regardaient le cricket!  J’en étais ahurie… En Inde on ne regarde pas le foot ou le hockey, personne ne s’intéresse au grand tennis, ni la natation, ni l’athlétisme – en Inde on regarde le cricket… des journées entières, sans cesse, on tourne sur plusieurs chaînes le reportage en direct d’un des plus stupides jeu au monde jamais inventé par l’humanité. Un mec court, lance un ballon, l’autre y tape avec un  battoir, le ballon rebondit, on l’attrape et tout le monde est heureux. C’EST TOUT!  C’est tout le sport là. On compte des points quelconques, bien sûr, quelqu’un gagne… des stars, des interviews, mais comment peut-on regarder ça?  Des milliers de fois les mêmes mouvements se répètent… lancé – rebondi, lancé – rebondi, lancé – rebondi…une heure après l’autre, jour après jour… des millions d’Indiens matent l’écran… lancé – rebondi… des zombis, bientôt leurs cerveaux vont sortir par les oreilles. Maintenant je vois «les ultras» intransigeants regarder ça!

    Sans détourner son regard de la télé, Michelle tape le coussin à côté d’elle en m’invitant  à m’asseoir.

    – Tu veux du thé, chérie?

    «Du thé»?  «Chérie»?? Et sa voix… dégoûtante, venant direct de mon anti-utopie fantastique.

    En m’approchant de Michelle, j’ai légèrement touché le japonais.

    – Tu peux faire gaffe?!

    – QUOI??

    – Quoi?  Je te dis si tu peux faire gaffe?

    L’air insolent… c’est quoi cette réclamation?  Quoi dire… au diable lui… Michelle!

    – Viens, arrête de freiner, assieds-toi, – de nouveau elle a tapé son coussin.- On s’amuse ici.

    – Et oui, Michelle… que se passe-t-il ici?

    – Arrête de piauler, mon petit, je vais t’expliquer. J’imagine ce que tu penses maintenant.

    – Un vrai bordel!

    – Regarde, tu vois?  – Michelle a sorti un calepin de quelque part, l’a tourné devant mon nez. Tu as fait attention que je l’ai toujours sur moi?

    – Non.

    – En restant ici, devant la télé, avec ma pomme, en faisant une mine débile, j’effectue constamment la pratique du polissage émotionnel, tu comprends?  Sans cesse!  Parce que si on lève le pied même un instant, l’émotion négative apparaît tout de suite. Dans ce cottage on a créé des conditions spéciales avec un seul but – provoquer quelqu’un d’avoir des émotions négatives en le faisant se sentir content du quotidien ou, au contraire, – mécontent du quotidien. Ici on a une collection de la variété la plus débile qu’on puisse imaginer, – Michelle a agité sa main en direction du magnétophone.- Et celle des livres les plus stupides, les films les plus idiots, ici les gens se rassemblent, prennent du thé, parlent de la météo, de la politique, s’engueulent, crient, s’en veulent, et tout ça est tellement naturel, que aucune personne de l’extérieur ne pourra appeler ça de la simulation, et si quelqu’un n’exprime pas la stupidité d’une manière assez naturelle, cela veut dire qu’il porte un mécontentement quelconque en lui, et qu’il se met à le dénicher.

    – Quel mécontentement y a-t-il de ne pas pouvoir jouer un idiot naturellement??

    – N’importe lequel. Par exemple, le plus simple est la préoccupation des opinions des autres. Tu as peur de ce qu’ils vont penser que tu es débile, tu joues donc un peu faux, pour qu’ils voient que, en réalité, tu es différent. Ici, parmi les nôtres, ce n’est que la première étape, le vrai entraînement commence quand tu vas dans la société, pour te conduire en vrai débile parmi les gens ordinaires – de sorte qu’ils y croient. C’est très difficile – éliminer la préoccupation des opinions des autres dans la vie réelle, mais les efforts faits dans de telles conditions sont beaucoup plus efficaces que «la pratique du canapé». Nous appelons cette partie du travail «les expérimentations sociales». Et à l’aide de ces expérimentations nous travaillons beaucoup sur les efforts d’élimination des mécontentements. Je cherche à éliminer les émotions négatives de façon impeccable, c’est mon but primordial, pour lequel je donnerai tout.

    – J’aime bien ta détermination crânée.

    – J’ai des choses à comparer. Le plus près tu es de l’élimination impeccable des émotions négatives, le plus souvent et le plus vivement les Sensations se manifestent, et tu sais… quand les éclats des Sensations apparaissent… le retour vers l’état quotidien est comme une petite mort, je combats la mort. Les gens pensent qu’ils meurent au moment où leur cœur s’arrête de battre, mais c’est une erreur terrible – ils meurent petit à petit à chaque fois qu’ils éprouvent une émotion négative.

    Je me suis rappelée que quand on avait été sur cette clairière à Bodh-Gayâ, Sart racontait quelque chose, et tout le monde l’écoutait comme la première fois. Là j’ai réussi à comprendre clairement pourquoi ils écoutaient comme ça, ils voulaient comprendre non seulement avec leurs raisons, mais avec tous leurs êtres. Cette fois Michelle n’a rien dit d’absolument nouveau, néanmoins je ressentais tout à fait distinctement la compréhension me remplir, – la compréhension du fait que chaque émotion négative est une petite mort, qui se compose progressivement en une maladie, la vieillesse et la mort définitive.

    – Mais tout le monde meurt, Michelle…

    – Salut, ma bonne-maman!! – Michelle a hurlé avec une voix vilaine et a éclaté de rire comme une locomotive. J’ai vu le japonais ne pas changer même d’expression de visage – il était assis, la même mine mécontente. Très naturel, il faut admettre… n’est-ce pas qu’un jeu? …

    – Pourquoi «la bonne-maman»?

    – Tu as du entendre cette expression des milliers de fois de la part des vieux et des vieilles et d’autres cadavres vivants. Que tu sais de la mort?  Pour toi «la mort» est un mot vide. Tu vois des gens mourir, mais que tu en sais de se qu’ils éprouvent à ce moment là?  Que tu sais de ce qui est la mort pour chacun d’eux?  Tu n’en sais rien, donc tu n’as rien à dire de la mort. Et moi je peux dire que la mort est aussi variée que la vie. Car on peut me prendre moi et un touriste ordinaire de Dharamsala, défoncé jusqu’à ce qu’il ne sais plus comment il s’appelle, et dire – vous êtes vivants tous les deux. Et oui, on est vivants tous les deux. Mais nous vivons différemment, sa vie et ma vie – sont des formes d’existence tout à fait différentes, et rien ne change du fait qu’on appelle ça par le même mot «la vie». La même chose concerne la mort – chaque mort est différente. La mort est la fin de tout seulement pour ceux dont la vie était la fin de tout – une simple phosphorescence des perceptions mécaniques.

    J’ai eu le souffle coupé… le mot «mort» a effondré, et à sa suite le rocher entier tout pourri de toute la billevesée, en rapport avec ce fantôme,  est allée au diable. Il faudrait rester un peu à éclaircir soigneusement toutes mes idées liées à la mort… comme si j’ai jeté un regard dans l’abysse… hein… la même sensation que quand j’avais regardé dans les yeux de Kam – la chute rapide dans l’abysse. L’exaltation instantanée, quelque chose s’est ouvert, le spasme dans la poitrine… non, pas un spasme – comme si un entonnoir s’est formé et je suis aspirée dedans…

    – C’est une sensation physique?

    – Quoi?

    – Je dis – tu éprouves quelque chose d’extraordinaire dans le corps?  – Michelle a indiqué justement l’endroit où l’éclat de cet «entonnoir» a eu lieu.

    – Exactement.

    J’avais envie de rester en silence, sans paroles, ni pensées, juste rester au calme pour permettre à cette compréhension, née après les paroles de Michelle sur la mort, de s’assoupir. Là je ressentais cette compréhension presque PHYSIQUEMENT – une sensation époustouflante… mais bien sûr, ce n’était pas une sensation, simplement la raison l’a appelée avec un mot connu par habitude, je ne le ressentais pas avec le corps, mais ce n’était pas non plus une émotion , ni une pensée… c’était quoi?!

    La frayeur est tombée pour effacer instantanément les traces mêmes de ce qui se passait en moi. Quelle merde!! Pourquoi ai-je ressenti cette frayeur!  C’était si important, si… particulièrement important – ce qui se passait.  Michelle m’observait avec attention, sans regarder un endroit concret, mais comme en me suivant de regard périphérique. Je me suis mise à raconter ce qui s’était passé, mais elle m’a interrompue au milieu de mon discours.

    – Juste là, Maya, en le racontant, tu te plains toi-même, la pitié de la perte, la colère pour cette frayeur apparue, etc., ainsi tu recouvres ton expérience par-dessus définitivement.

    – Quoi faire?

    – Quoi faire?  La même chose qu’avant – éliminer les émotions négatives tout le temps quand elles apparaissent. En parallèle – justement «en parallèle», et pas «à la place», c’est même mieux après l’action d’élimination de rechercher les concepts en rapports avec elles. Tu as vécu une expérience tout à l’heure – c’était une expérience d’une nouvelle perception!  Justement nouvelle, car il est impossible de la ramener à ce que tu avais éprouvé auparavant. C’est l’effet de la pratique de la voie directe. Au fur et à mesure que tu élimines les mécontentements et tu aspires à des états que tu aimes, des perceptions tout à fait nouvelles se mettent à se manifester en toi, ainsi que de nouvelles nuances, et tu obtiens de nouveau la possibilité de tendre vers elles et découvrir de plus en plus des espaces d’états nouveaux. Tu as vécu une expérience et le pire de ce que tu peux entreprendre maintenant – c’est de te mettre à te plaindre toi-même parce que l’instant a été trop court, la colère envers la peur, qui a fermé l’accès à la sensation, etc. Tu as déjà vécu cette expérience!  Rende t’en compte et accroche une grande affiche chez toi sur le mur disant «J’AI VECU CETTE EXPERIENCE», cela, personne ne pourras jamais te l’enlever. La pratique consiste en de nouvelles aspirations incessantes de tomber dans un état qui te plait, accumuler moments par moments, parce que justement l’expérience de ces sensations s’accumule comme l’âge. Ca ne t’étonne pas que quand tu as douze ans, ton corps change brusquement, les règles commencent, les seins poussent?  C’est la même chose avec les sensations. Lorsqu’un certain «âge» de leur manifestation s’accumule – elles changent, elles changent leurs qualités, deviennent vives, envahissent tout ton être, le transforme, ouvre de nouvelles possibilités. Garde tes moments seconde par seconde, bats-toi pour chaque instant, puisque justement maintenant tu aurais pu ne pas éprouver d’émotions négatives, mais les éliminer pour vivre encore un instant de ces sensations, et puis encore et encore!  Ensuite, les instants commenceront à former des groupes d’instants, la sensation durera alors quelques secondes, puis – quelques minutes!  Cela se vit comme une renaissance, c’est une renaissance, mais c’est indescriptible, il faut le vivre.

    Nous sommes restées silencieuses pendant dix minutes, je digérais ce que j’avais entendu et ressenti, Michelle et le japonais continuaient leur affaire, en ressortant leurs calepins de temps en temps pour faire des notes.

    – C’est-à-dire tout ce que je vois ici n’est qu’un jeu…

    – Oui, c’est un jeu. Tu veux jouer?

    – Non, pas pour l’instant…

    – Au moment où tu feras une mine débile, tu vas te transformer en un débile l’instant même, au moment où tu te mets à te comporter comme un imbécile – dire des mots d’imbécile, être faussement poli, etc., tu te transformeras tout de suite en imbécile, des pensées stupides viendront dans la tête, des émotions négatives arriveront en grande quantité. C’est l’entraînement alors. Je peux jurer sur les couilles de ce beau garçon, – Michelle a fait un geste en direction du japonais,  – que tu as éprouvé une vingtaine d’émotions négatives très vives le temps que tu t’approchais de la porte vers moi.

    – Oui, c’est vrai. Donc… il me vérifiait en me parlant d’un ton irrité?

    – Vérifiait?  Pourquoi faire?  Maya, ma petite pute, oublie tes habitudes d’écolière. Ici personne ne se soucie de vérifier qui que ce soit… c’est seulement celui qui n’a rien à faire qui vérifie, mais il n’y a pas de tels gens ici, ici si tu lèves ton pied une seconde – ça y est, une saloperie quelconque ressort tout de suite. Ce n’est pas inscrit sur toi que tu es une petite gaffeuse, si tu es là – tu t’engages dans le tourbillon de notre pratique, que tu le veuilles ou pas, ton arrivée a été utilisée donc pour l’entraînement, et comment toi tu utiliseras cette situation ne dépend que de toi, tu choisis toi-même. Tu as choisi de te vexer, d’avoir une attitude négative.

    – Je n’ai pas choisi, j’ai…

    – Quoi??

    – Euh… si, bien sûr…

    C’est incroyable – l’automatisme «je n’ai pas choisi d’éprouver la colère, elle …» sort toujours. Il semble que je «comprends» tout, mais la vraie compréhension n’arrive toujours pas – une telle compréhension qui remplirait tous mes actes, mes paroles, chaque respiration.

    – Quels d’autres moyens de vous provoquer vous-mêmes employez-vous?

    – Beaucoup, beaucoup d’autres… ce que notre imagination nous dit, puisque beaucoup de choses dépendent des caractéristiques individuels, quelqu’un a plus l’habitude de devenir irritable, l’autre – éprouver le contentement…

    – Le contentement – vous l’éliminer aussi?

    – Bien sûr!  Le contentement est la même chose qu’un morceau de merde pour un bacille dysentérique. N’as-tu pas remarqué que le plus de contentement tu éprouves, le plus stupide tu devient, le plus d’émotions négatives apparaissent, le moins tu as d’intérêt et d’aspiration à l’égard de la vie?  C’est pourquoi celui qui est enclin au contentement – en général, ça concerne tout le monde, bien sûr, il crée une atmosphère ressemblant à un confort ordinaire ménager, qui provoque le contentement, qui assomme. Des coussins doux, de la bonne nourriture, des bons films, du sexe…

    – Du sexe?

    – Bien sûr. Pour tout le monde qui ne fait pas la pratique, le sexe est tout d’abord un moyen d’obtenir des impressions, d’éprouver du contentement, jouir et s’oublier.

    – Donc, le contentement c’est pas bon?

    – «Pas bon»??

    – Zut, c’est-à-dire que je voulais dire que… euh. Je l’ai déjà dit. ««Voulais dire». Donc…

    – Et oui, ça veut dire que tu n’acceptes que formellement le fait qu’il n’y a rien de bien, ni de mal, or, en réalité, tu continues à entretenir ces concepts en toi. Ce n’est pas facile de se débarrasser de l’habitude de suivre les concepts, il ne suffit pas de simplement «comprendre» – il faut appliquer cette compréhension à la vie, en remplir chaque acte, et pour cela la pratique de la provocation est aussi très utile, mais c’est une autre conversation déjà, pas maintenant… il y a beaucoup de méthodes d’exterminer les germes de stupidité de soi-même, par exemple, la pratique du remplacement mécanique… bon, on en reparlera plus tard. – Michelle a gardé le silence pendant un court moment. –  Pour revenir au mécontentement, beaucoup de choses et de perceptions me font plaisir, bien plus – c’est justement l’obtention du plaisir qui est une de nos énergies motrices, tu veux avoir du plaisir dans la vie, n’est-ce pas?  Moi, je veux, les émotions négatives et d’autres saloperies m’en empêchent monstrueusement, et, même si ça peut paraître bizarre, le contentement aussi!  Ne confonds pas le contentement et le plaisir. Ce sont des choses principalement différentes. Le plaisir te rend plus dynamique, passionnée, il fait naître l’anticipation, de différentes facettes de sensations se manifestent, la détermination devient plus ardente… mais au moment où le contentement apparaît – tout se retourne sens dessus dessous. Examine ce point toi-même – c’est facile. L’une des connerie des plus farouches prêchée par la société – c’est le faux concept comme quoi le contentement mène l’homme au bonheur, à une vie remplie. En réalité, tout est exactement le contraire, donc le temps que tu n’es pas empoisonnée par le contentement, c’est difficile à comprendre.

    – Pourquoi les gens ne s’empoisonnent pas avec le contentement alors et n’arrivent pas à cette compréhension aussi simple?

    – Mais comment?

    – Quoi?

    – Comment s’empoisonner avec le contentement?  Il faut le ressentir, mais comment le ressentir si les gens ne suivent presque jamais leurs désirs?  Le contentement se fait ressentir lorsqu’on a ce qu’on veut, et si tu ne fais pas ce que tu veux, si tu ne fais qu’accomplir les programmes conceptuels durant toute la vie, ceux qui ont été inculqué dans la petite enfance, le contentement devient alors une sorte de but blende.

    – Oui… c’est curieux… c’est dur…

    – Dur?  – Michelle a incliné la tête en interrogation. – Et vivre dans le marasme complet, comme tu le fais –  c’est pas dur? C’est à toi de choisir, Maya, qu’à toi.